[Fiche] Changements, P.Watzlawick


Grands effets et petites causes.
Un bon nombre de gens vivent dans la peur de commettre des erreurs, ce qui les porte à se tromper plus souvent. Ce fut le cas notamment d’une assistante dentaire, tout à fait compétente, mais persuadée qu’elle allait faire une grosse bévue et être virée. Pour résoudre son problème, il lui a été ordonné de commettre chaque jour une petite faute, peu importante mais assez bête. Il lui a été expliqué que la vraie maîtrise de problèmes semblables n’est établi que lorsque le sujet peut non seulement les éviter mais aussi les provoquer à volonté. Dans les temps qui suivirent, elle fut tellement absorbée par sa promesse de faire cette petite erreur quotidienne, qu’elle n’avait plus le temps de se préoccuper de sa potentielle “grande bévue”. Progressivement, elle trouva toute cette gymnastique ridicule et s’éloigna de son problème, effectuant naturellement un changement 2. L’acte à accomplir était de faible envergure mais délibéré, ce qui a provoqué le changement de comportement.

Le “coup de Bellac”.
Une assistante de de direction, intelligente et expérimentée, avait des ennuis avec l’un de ses supérieurs. Elle l’agaçait par sa façon d’agir et lui ne manquait pas une occasion de l’humilier. Elle prenait alors envers lui une attitude encore plus distante et condescendante. Ce qui faisait monter l’escalade. Il lui a été suggéré, dès le prochain incident, de réaliser une action un peu folle : prendre son supérieur à part, lui expliquer qu’un tel comportement l’excite sexuellement ” quand vous me traitez comme ça, ça m’excite”, et quitter la pièce très vite avant qu’il ne puisse répondre. Après avoir été horrifiée par l’idée, elle l’a trouvé très drôle, impatiente de l’essayer. Elle n’en a jamais eu l’occasion : dès que sa décision fut prise, et dans la semaine qui suivit, le comportement de son patron a subitement changé, devenu poli et agréable.

La certitude de pouvoir affronter différemment la situation a suffit a modifié le comportement du sujet. Ce changement s’est transmis par de multiples et imperceptibles canaux de communication, sans qu’aucune action explicite soit nécessaire. C’est le coup de Bellac.

Utiliser la résistance.
Certains patients semblent persuader que leur problème n’a pas de solution, et tente de “vaincre” le thérapeute pour le prouver. Pour agir sur cette attitude, on peut être amené à poser la question suivante : “Pourquoi voudriez-vous changer ?” Celle-ci sort du cadre de jeu imposé par le patient, et l’oblige à réfléchir différemment.

De même mieux vaut paradoxalement utiliser le message “allez-y doucement” pour faire croire au patient qu’on le freine dans des efforts trop importants pour lui. On peut même lui prescrire de rechuter volontairement. Ainsi, soit la rechute a lieu et un recadrage suffit pour prouver au patient qu’il a désormais suffisamment de maîtrise pour produire délibérément une rechute, soit elle n’a pas lieu ce qui “prouve” qu’il est désormais assez maître de lui pour éviter son problème.

Un élève exclu du lycée pour trafic était furieux contre son proviseur et refusait le travail scolaire imposé à la maison. La solution proposée à sa mère fut d’insinuer chez le garçon l’idée que le proviseur attachait beaucoup d’importance à la fréquentation des cours et croyait fermement qu’un élève était incapable de suivre autrement. Elle devait lui faire remarquer que s’il parvenait à se débrouiller seul, le proviseur en serait très irrité, et qu’il ne devrait donc pas trop s’appliquer pour ne pas faire perdre la face au proviseur. Le désir de vengeance se lut immédiatement dans les yeux du garçon, qui travailla de façon bien plus efficace qu’auparavant.

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