Critique : Qu’avons-nous fait de nos rêves ? J.Egan


Cette année je participe à un concours de critique littéraire…

Dans son roman “Qu’avons-nous fait de nos rêves”, Jennifer Egan nous dépeint une galerie de portraits désenchantés. Un groupe d’adolescents est au coeur de l’histoire. Elle nous raconte par bribes, des extraits de leur vie de l’enfance à l’âge adulte. Pour nous permettre d’appréhender la langueur de leur existence, elle tisse progressivement autour d’eux le maillage des personnages qui les entourent. Des parents, des amis, eux-mêmes pétris de soucis et de rêves déçus. Elle déroule son récit en alternant les protagonistes, les emboîtant comme des poupées russes : à chaque chapitre, une nouvelle tranche de vie, avec son acteur principal et son lot d’interlocuteurs qui feront l’objet des sections suivantes.

Dans ce jeu de construction, Jennifer Egan nous perd. Elle nous oblige à chaque fois à nous plonger dans une nouvelle histoire, à nous imprégner d’une nouvelle existence. Le style varie d’un extrait à l’autre, si bien qu’il faut parfois longtemps avant de comprendre de qui il s’agit. L’auteur alterne des passages originaux et d’autres plus décevants. La présentation du journal de la fille de Sasha, sous forme de diaporama, est très innovante et très bien réalisée. A l’inverse, les déboires des personnages masculins sont quelque peu répétitifs.

Au final, l’histoire est hachée, difficile à suivre, et le fil conducteur trop ténu. Le rythme est irrégulier et le suspens inégal voire quasi inexistant. Quand une situation commence à susciter notre intérêt et notre attachement au personnage (la cléptomanie de Sasha, la relation entre Dolly et sa fille, la détresse de Rob), l’auteur l’écourte aussitôt, sans expliquer si la problématique est résolue. Elle diffuse en nous, au-delà d’une mélancolie dont tout le livre est empreint, un sentiment de frustration. Peut-être souhaite-t-elle ainsi nous immerger dans sa vision morose et déceptive de la vie. Celle-ci ne serait finalement qu’une suite d’épisodes décousus, sans queue ni tête, une multitude de rencontres furtives qui nous forgent sans jamais prendre sens.

[cilaverce]

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